Lors d’une séparation, les inégalités liées au genre demeurent une réalité et ce, en dépit d’une égalité de principe consacrée dans les textes de droit de la famille (articles 371-1 ou 373-2 du Code Civil).
Ainsi, les femmes qui travaillent à temps plein ou qui sont particulièrement investies professionnellement, peuvent parfois être perçues comme « moins disponibles » pour leurs enfants. Cette perception, enracinée dans l’idée traditionnelle d’un rôle maternel sacrificiel, est de nature à avoir un impact sur les arrangements parentaux et les décisions judiciaires s’agissant de la garde des enfants. À l’inverse, lorsqu’elles ne travaillent pas (du fait d’un accord passé avec leur conjoint avant la séparation) ou lorsqu’elles réduisent leur activité professionnelle pour se consacrer à l’éducation de leurs enfants, elles s’exposent à des difficultés financières importantes après la séparation – et aux reproches mille fois répétés de, prétendument, se complaire dans une forme d’oisiveté, laquelle n’aurait pas à être financée par l’ex-conjoint ou l’ex-partenaire.
A l’inverse, les hommes se retrouvent encore trop souvent confrontés à la nécessité de « prouver » leur compétence parentale et leur disponibilité, lorsqu’ils souhaitent obtenir une garde alternée ou la résidence principale de leur(s) enfant(s). Les stéréotypes présentant les pères comme éloignés des responsabilités domestiques persistent, malgré une implication croissante des hommes dans la vie de leurs enfants.
Ce biais peut encore entraîner des décisions qui limitent leur rôle actif dans la parentalité.
Les distinctions peuvent ainsi encore apparaitre à travers des critères tels que :
- Le besoin de maternage des enfants en bas âge: en considérant que les enfants en bas âge ont un besoin de maternage important, certains Juges persistent à privilégier la fixation de la résidence auprès de la mère au détriment de pères pourtant volontaires et disponibles pour une garde principale ou partagée
- Les revenus financiers : les femmes subissent trop souvent une plus grande perte économique en raison des inégalités salariales et de carrières interrompues pour des raisons familiales.
- Les normes culturelles : les jugements implicites sur les rôles parentaux continuent aussi d’influencer certaines décisions judiciaires. Ainsi l’idée qu’une mère est naturellement plus apte à s’occuper des enfants en raison de son rôle historique de nourrisseuse et de principale figure maternelle persiste et s’impose parfois sans que ne soient suffisamment considérés de manière équitable les capacités et les désirs du père
- La disponibilité parentale : il est encore souvent attendu des mères qu’elles soient plus présentes et disponibles tandis les pères peuvent être « jugés » sur des engagements plus ponctuels.
Les parents de même sexe peuvent aussi rencontrer des obstacles uniques dans les processus de séparation.
Malgré une reconnaissance juridique accrue des familles homoparentales, les jugements peuvent encore refléter des biais sociaux ou une incompréhension des dynamiques propres à ces familles. Il peut ainsi arriver que certains jugements attribuent une importance plus forte au parent biologique, ce qui peut marginaliser le rôle de l’autre parent, pourtant pleinement investi dans la vie de l’enfant.
Ces situations soulignent l’importance de garantir que les décisions soient fondées sur l’intérêt de l’enfant et non sur des préjugés ou des conceptions traditionnelles de la parentalité.
Ces dynamiques montrent que les séparations conjugales ne se limitent pas à une rupture personnelle : elles reflètent également des enjeux systémiques autour du genre.
Le droit de la famille, en tant que cadre régulateur, joue un rôle essentiel pour évoluer vers une plus grande équité. Cela passe par une reconnaissance des réalités sociales et économiques des familles, mais également par une sensibilisation des professionnels du droit aux biais implicites qui peuvent influencer les jugements.
L’objectif n’est pas d’imposer un modèle unique, mais de garantir que les décisions prennent en compte les besoins et l’intérêt des enfants et les capacités des parents, sans être dictées par des préjugés liés au genre.