Les portes sont closes depuis le 17 mars 2020.
Le confinement implique un rapprochement constant et contraint des membres du foyer et une distanciation avec les proches.
Le risque sanitaire, l’exposition en continu aux informations, les préoccupations économiques exacerbent les tensions et le stress.
L’isolement des femmes et des hommes ayant un partenaire violent s’accentue, la situation des mineurs en danger et/ou victimes de violences inquiètent plus que jamais les professionnels.
Le contexte actuel rend les signalements plus compliqués et compromet la disponibilité de ceux qui auraient pu intervenir habituellement.
Après quatre semaines de confinement, le constat est sans appel : les violences intrafamiliales s’intensifient.
A l’heure où il est demandé aux français un effort de quatre semaines supplémentaires, il est indispensable de rappeler que le confinement ne doit jamais permettre de réduire au silence les victimes de violences intrafamiliales.
1. Circuit de signalement s’agissant des mineurs en danger ou victimes de violences.
Le confinement piège les enfants victimes de violences psychologiques, physiques, sexuelles, qui ne disposent plus de la possibilité de s’extraire de ces situations par des biais habituels (école, activités extrascolaires) ou encore de celle de se confier à un tiers.
Voici un rappel des dispositifs visant à protéger les enfants en situation de danger et à lutter contre les violences faites aux mineurs :
1) En cas de danger grave avec nécessité d’une intervention sur place et lorsque cela est possible, il convient de contacter les services de première urgence.
les services de police ou de gendarmerie (17 ou 112),
les pompiers (18 ou 112),
ou encore le Samu (15).
Les appels de mineurs ou concernant des mineurs sont une priorité et doivent être traités comme tel.
Un dispositif de signalement des violences intrafamiliales via les pharmacies a été mis au point par le Ministère de l’Intérieur avec l’appui de l’Ordre national des pharmaciens.
Les victimes peuvent utiliser le code « masque 19 » pour se faire identifier.
2) Tout citoyen est tenu d’informer les autorités compétentes s’il a connaissance de ce qu’un mineur est en danger ou victime de violences intrafamiliales.
L’enfant est considéré comme étant en danger si certains aspects de sa vie sont gravement compromis ou risquent de l’être (Cf. article 375 du Code Civil). Sont concernés :
la santé ou le développement physique du mineur,
sa sécurité,
sa moralité,
son éducation ou son développement intellectuel,
son développement affectif ou social.
** Signalement au Juge des Enfants
Toute personne témoin ou soupçonnant un enfant en danger ou risquant de l’être doit signaler les faits en cause.
Il peut s’agir d’un particulier ou d’un professionnel.
Le mineur peut également signaler lui-même sa situation ou celle d’un autre enfant qu’il connaît.
A titre exceptionnel, le Juge des Enfants peut se saisir lui-même.
Le fait d’alerter volontairement les autorités sur des faits que l’on sait inexacts constitue le délit de dénonciation calomnieuse, qui est passible d’une peine de 5 ans d’emprisonnement et d’une amende de 45 000 euros (Cf. article 226-10 du Code Pénal).
** Signalement au Procureur de la République de toute infraction commise à l’encontre d’un mineur
** Emission d’une information préoccupante à la Cellule de Recueil des Informations Préoccupantes (CRIP) de son département
Cela revient à alerter le Président du Conseil départemental sur l’existence d’un danger ou d’un risque de danger concernant un mineur.
3) Les procédures judiciaires d’urgence permettant de garantir la protection des mineurs continuent d’être assurées.
Des permanences sont tenues dans les Tribunaux pour Enfants afin que puissent continuer à être prises les mesures utiles à protection des mineurs exposés à une situation de danger (ordonnance de placement provisoire).
S’il y a lieu, l’accueil de ces enfants est assuré par les professionnels de la protection de
l’enfance qui continuent d’être mobilisés en cette période de crise sanitaire.
4) S’agissant de la répression des violences faites aux enfants.
Les audiences de comparution immédiate et les présentations devant le juge d’instruction sont maintenues dans le cadre du plan de continuation d’activité des Juridictions.
5) Numéros et contacts utiles.
** La ligne 119 – Allô Enfance en Danger est dédiée à la prévention et à la protection des enfants en danger ou en risque de l’être.
Ce numéro national d’urgence est gratuit et accessible 7 jours sur 7 et 24h/24.
** Les associations de protection de l’enfance restent à l’écoute :
- La Voix De l’Enfant : 01 56 96 03 00
- L’enfant Bleu Enfance maltraitée : 01 56 56 62 62
- Colosse aux pieds d’argile : 07 50 85 47 10
- Stop maltraitance / Enfance et Partage : 0 800 05 1234
2. Femmes / hommes victimes de violences conjugales : quels moyens d’action en periode de confinement ?
Les violences conjugales ont augmenté de 30% depuis le début le 17 mars 2020.
Les mesures de confinement constituent « un terreau propice aux violences domestiques », à l’encontre desquelles il convient de lutter âprement.
Rappel des dispositifs en place en la matière.
1) En cas de danger grave et immédiat, la demande d’intervention des services d’urgence effectuée par la victime / les éventuels témoins.
Cette demande d’intervention peut être effectuée par téléphone en contactant :
le 17 ou le 112 (service de police ou de gendarmerie),
le 18 ou le 112 (les pompiers)
le 15 (le SAMU)
le 114, par SMS.
Comme rappelé ci-dessus, en tant que professionnel de premier recours, le pharmacien constitue un point d’appui possible pour alerter les forces de l’ordre et leur permettre, le cas échéant, d’intervenir en urgence (code : « masque 19 » ).
2) Lorsqu’il est possible, le dépôt de plainte.
Toute personne victime de violence est autorisée à se rendre sans délai au commissariat le plus proche de son domicile ou auprès de tout fonctionnaire de police pour signaler les faits dont il a été victime.
Le déplacement pour déposer plainte constitue donc une exception à l’obligation de confinement.
A l’issue de ce dépôt de plainte, la victime est orientée vers le service d’urgence médico-judiciaire (UMJ) afin de faire constater le préjudice physique et le retentissement psychologique des violences subies.
L’UMJ évalue l’ITT (incapacité temporaire de travail). Le certificat médical établi par l’UMJ est utile, voire indispensable, pour établir la réalité des violences, obtenir éventuellement réparation ou encore solliciter une ordonnance de protection.
3) S’agissant de la répression des violences conjugales, les audiences de comparution immédiate et les présentations devant le juge d’instruction sont maintenues dans le cadre du plan de continuation d’activité des Juridictions.
A cet égard, le parquet est appelé à faire preuve d’une vigilance accrue pour continuer à assurer un suivi du traitement des dossiers de violences conjugales.
4) La demande d’ordonnance de protection.
Le plan de continuation d’activité du Tribunal Judiciaire assure une permanence s’agissant des demandes d’ordonnance de protection déposées devant le Juge aux Affaires Familiales.
Le conjoint victime peut ainsi solliciter, sous réserve d’apporter la preuve du caractère vraisemblable des violences dénoncées et d’une situation de danger :
des mesures d’éloignement du conjoint violent,
l’attribution à son profit du domicile de la famille,
une interdiction d’entrer en contact,
une éventuelle contribution parentale en présence d’enfants (Cf. articles 515-9 et 515-11 du Code civil).
Ces mesures sont prononcées pour une durée de six mois et peuvent être prolongées sous certaines conditions (Cf. article 515-12 du Code Civil).
5) Le dispositif « TGD » (Téléphone Grave danger).
Ce dispositif de téléprotection consiste à assurer l’effectivité de la protection des personnes particulièrement vulnérables victimes de viol ou de violences conjugales, leur permettant d’alerter les forces de l’ordre en cas de grave danger.
Ce dispositif continue de fonctionner en dépit de la crise sanitaire, sous l’égide du CIDFF (Centre pour le droit des femmes et des familles).
Le suivi des bénéficiaires est assuré par téléphone, en lien étroit avec le parquet
Pour saisir le CIDFF d’une situation, il convient d’écrire un mail à tgd@cidffdeparis.fr ou encore de contacter le 01 83 64 72 01.
En raison d’une forte demande des Juridictions, Nicole Belloubet a annoncé l’octroi de 250 téléphones grave danger supplémentaires.
6) La demande de place dans un hébergement d’urgence.
Certaines victimes de violences conjugales préfèrent fuir le domicile ou n’ont pas d’autre choix que d’en partir. Elles doivent alors former une demande d’hébergement d’urgence afin de pouvoir bénéficier provisoirement d’un environnement sécurisant et aidant pour elle et éventuellement leurs enfants.
La ville de Paris indique avoir libéré des logements afin d’être en mesure d’accueillir les victimes de violences, et précisément 11 places supplémentaires dans les centres d’hébergement, ce qui reste très insuffisant quand on sait l’ampleur du besoin en la matière.
La Mairie dit aussi avoir réservé 10 logements sociaux, dont les adresses sont tenues secrètes et qui ont vocation à recevoir les victimes de violences.
7) Numéros et contacts utiles.
Sites/ plateformes
** La plateforme droit.direct.fr, mise en place pour Paris et MontreuiL-sur-Mer, a pour objectif de permettre aux victimes en situation de danger de pouvoir accéder près de chez elles à tous les services et professionnels en mesure de les aider.
Le service est gratuit, anonyme et confidentiel.
** La plateforme : arretonslesviolences.gouv.fr
Elle permet d’échanger avec les forces de l’ordre formées sur ces thématiques
** le site stop-violences-femmes.gouv.fr
** france-victimes.fr : mail de l’Aide aux victimes de tout type de violence
Numéros utiles
39 19 : pour des informations sur les droits des femmes victimes de violences et des mise en relation avec des associations proches de leur domicile (accessible du lundi au samedi de 9 heures à 19 heures).
0 800 05 95 95 : numéro du collectif Viols femmes Information (accessible du lundi au vendredi de 10 heures à 19 heures).
0 800 08 11 11 : numéro national du Planning Familial, qui peut être contacté pour les questions relatives à la contraception, aux IVG, aux IST ainsi qu’aux violences et à la sexualité.
08 019 019 11 : numéro national mis en place au bénéfice des auteurs de violences conjugales afin de leur permettre de dialoguer et freiner le passage à l’acte (accessible du lundi au dimanche de 9 heures à 19 heures, en lien avec la FNACAV -Fédération nationale d’accompagnement des auteurs de violences-).